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Édition 7 - Juin 2004

Anas Al-Shaikh

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Artiste & Oeuvre

Anas Al-Shaikh

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Anas Al-Shaikh

Anas Al-Shaikh

Anas Al-Shaikh

 

Lors d’une rencontre à Dubaï avec des artistes, nous avons mentionné que nous allions à Bahreïn. Nos interlocuteurs nous ont dit qu’il nous fallait absolument y faire la connaissance de Anas Al-Shaikh. Son nom résonna de nouveau au cours de la première conférence d’un séminaire au Forum Culturel de Bahreïn - Asilah. Le conférencier, Balqees Fakhro, attira notre attention au travail de Al-Shaikh comme exemple exceptionnel d’une nouvelle approche artistique à Bahreïn. Le lendemain, nous l’avons rencontré pour un long entretien extrêmement intéressant dans la galerie Al Riwaq.

Anas Al-Shaikh a répondu à nos questions concernant l’intention de son travail comme suit: "La chose la plus importante pour moi en tant qu’individu arabe dans le monde islamique est l’observation que dans maints domaines, comme la politique, les droits de l’homme et la démocratie, nous n’avançons pas. Nous semblons incapables de produire une nouvelle culture, un nouvel art. J’essaye donc d’établir un dialogue avec nous-même, avec notre ego." Il s’intéresse à "... comment focusser certaines choses de manière artistique, comment se servir des nouveaux médias comme moyen d’expression pour nos idées, nos problèmes et notre confusion qui nous fait le plus souffrir. ... Chacun a ses idées propres et manque de respect pour celles des autres, n’agit que par rapport à ses croyances, pensant que la réalité est de son côté, et non du côté des autres. Avec mon art, j’essaye de discuter de tous ça. Je crois qu’il faut d’abord chercher la cause des problèmes avec soi-même avant d’en donner la responsabilité aux autres. ... le plus important est de trouver comment changer notre vie nous-même. Si nous voulons progresser dans cette direction, alors nous nécessitons plus de démocratie et de foi en les droits de l’homme, plutôt que dans le fait que tous les autres sont nos ennemis. Chacun a sa propre croyance, sa propre culture; la question se pose, comment communiquer ces cultures et comment, au travers des cultures, parvenir à la solution la meilleure pour tous. J’expérimente moi-même avec ces choses dans mon travail."

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Anas Al-Shaikh

Né 1968 à Bahreïn. En 1989, diplôme d’architecture, Jordanie. Membre de l’Association d’Art Contemporain de Bahreïn.

2001 Memory of Memories, exposition personnelle. Participe à de nombreuses expositions de groupe. A initié en 2002 l’exposition sur l’art installatif à Bahreïn.

Un CD-ROM (10:24 min.) sur Memory of Memories documente d’autres pièces.

Voir également:

Éditorial
Sur notre voyage
au Golfe Persique

 

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Bahreïn, carte

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Anas Al-Shaikh

Anas Al-Shaikh nous dit qu’un médium bidimensionnel comme la peinture ne suffit pas à la réalisation de ses idées. Cette situation pourrait être reliée au fait qu’il a suivi des études d’architecture et de décorateur de théâtre, et qu’il se sent attiré par des oeuvres à conception spatiales, lui permettant de transmettre des perspectives différentes au public. Il nous donna plus de détails quant au sens de son travail et à la manière par laquelle il désire toucher le public face aux photos et vidéos de l’installation "Memory of Memories" (Mémoire des mémoires), à jour son travail le plus complexe.

Anas Al-Shaikh


Anas Al-Shaikh


Anas Al-Shaikh

La pièce fut créée en 2001, dans un garage de Al Gudaibiya, un des quartiers les plus anciens et pauvres de la capitale de Manama. Les habitants en sont pour la plupart de nationalités différentes, avec seulement quelques Bahreïnis. Pendant deux ans, lorsqu’il avait à faire dans le quartier, il garait régulièrement sa voiture tout près et avait remarqué cet espace, dont l’atmosphère lui rappelait la maison en Arabie Saudite, oû enfant, il avait vécu avec sa famille.

L’installation associe l’enfance et les mémoires de jeunesse de Anas Al-Shaikh avec les évènements récents de l’histoire qui ont été repris par la mémoire collective, comme la guerre entre l’Irak et l’Iran, l’invasion de l’Irak au Kuweit, et la première guerre du Golf. "En ce qui concerne nombre d’évènements dans notre région, nous agissons comme des spectateurs au lieu de concentrer notre énergie à opérer un changement nous-mêmes." À propos de la grande photographie sur le mur du fond qui déploie des formes géométriques rappelant une cible, il rentre dans le détail: "L’image reflète notre situation dans le monde arabe. Il y a une autorité au-dessus de nous – un dirigeant local ou une puissance provenant d’en dehors de notre région – qui nous donne des ordres. On nous dit tout le temps ce que nous avons à faire. Sur la photo, les hommes poursuivent avec leurs bras les commandes militaires: ‘1 2 3 en haut ... en bas ...’. J’énonce qu’on nous dicte ce que nous avons à penser et à voir, ce que nous avons le droit de dire, et ce en quoi nous devons croire. Nous n’avons pas le droit de développer nos aptitudes, visions ou pensées, ou de choisir nous-mêmes ce en quoi nous voulons croire." (Pour plus de détails, voir la version zoom des photos).

Nous voulions connaître les réactions à son travail. Anas nous a dit qu’il avait une relation agréable et directe avec les gens "simples" du quartier. Ils sont venus au garage par pure curiosité, sans s’imaginer qu’ils visitaient une exposition d’art. Certains ont aimé ce qu’ils ont vu, d’autres ont trouvé ça étrange, mais l’ont respecté, lui, pour avoir fait ce genre de chose dans un quartier populaire. Par contraste, de nombreux collègues et experts de la scène artistique ont reconnu ses intentions mais tout de suite rejeté d’office la technique vidéo et l’art installatif, reconnaissant uniquement les valeurs de la peinture et de la sculpture.

Anas Al-Shaikh situe le début de son travail avec les installations en 1994, lorsqu’il était le seul à travailler de cette manière à Bahreïn. Il a donc tenté d’encourager les jeunes artistes de son pays à être plus ouvert et à travailler avec des méthodes expérimentales. Avec eux, il a étudié et discuté des projets par d’autres artistes dans les livres, catalogues et sur l’Internet. En 2002, il a organisé la première exposition de groupe pour l’art installatif à l’Association d’Art Contemporain de Bahreïn, avec la participation de quatre artistes seulement. En 2003, l’exposition comptait déjà neuf artistes et la présentation prévue pour la fin 2004 sera encore plus grande.

Parmi les idées que Anas Al-Shaikh désire réaliser dans un avenir proche, on trouve l’organisation d’ateliers interdisciplinaires et internationaux sur l’art et les nouveaux médias: le premier sera intitulé "Dialogue avec l’ego", le second "Dialogue avec l’autre".

Gerhard Haupt et Pat Binder

Voir aussi >> l'éditorial sur notre voyage
au Golfe Persique en avril 2004

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